Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

Service d’observation du Soleil

mercredi 18 février 2009, par Jean-Marie Malherbe & Sylvain Cnudde

 1 – Un peu d’histoire…

L’intĂ©rĂŞt pour les observations du Soleil en France remonte Ă  la fin du XIXème siècle, Ă©poque oĂą le cĂ©lèbre astronome Jules Janssen fonda l’Observatoire de Meudon pour en faire un observatoire « d’astronomie physique » (science qu’on appelle aujourd’hui « astrophysique »), en complĂ©ment de l’astronomie de position et de la mĂ©canique cĂ©leste qui Ă©taient pratiquĂ©es depuis deux cents ans Ă  l’Observatoire de Paris. Les progrès considĂ©rables des physiciens et des mathĂ©maticiens au XIXème siècle rendaient possible vers 1875 l’amorçage d’un tournant vers la physique des astres, autrement dit dĂ©crire leur composition chimique, leur formation, leur Ă©volution… Telle Ă©tait la vocation du nouvel observatoire « d’astronomie physique » de Meudon voulu par Janssen.

Celui ci s’intĂ©resse particulièrement au Soleil sous l’angle de la spectroscopie et de la photographie, deux techniques naissantes qui vont rĂ©volutionner l’astronomie : la spectroscopie permet d’étudier les interactions entre la matière et le rayonnement dans les atmosphères stellaires, en interprĂ©tant les raies spectrales atomiques ; quant Ă  la photographie, elle permet de conserver un rĂ©sultat objectif de l’observation, contrairement au dessin couramment pratiquĂ© jusqu’alors. Janssen se passionne pour l’imagerie de la surface du Soleil, en particulier la granulation. Il effectue aussi de nombreuses missions d’observations d’éclipses totales et dĂ©couvre, par la spectroscopie, la prĂ©sence d’HĂ©lium dans l’atmosphère solaire. Il dĂ©montre ensuite la possibilitĂ© d’observer les protubĂ©rances au limbe en dehors des Ă©clipses, en appliquant les principes de la spectroscopie. Ces travaux prĂ©curseurs sont fondamentaux : grâce Ă  eux, le successeur de Janssen, Henri Deslandres, va mettre au point au cours de la première dĂ©cennie du XXème siècle le spectrohĂ©liographe, qui est un spectrographe permettant d’observer la surface du soleil dans un intervalle spectral extrĂŞmement Ă©troit et centrĂ© sur une raie d’absorption. A partir de 1909, il y a donc cent ans, les observations systĂ©matiques de la surface du disque solaire vont commencer Ă  Meudon et perdurer jusqu’à nos jours. George Hale, aux Etats Unis, aura une idĂ©e similaire, et l’on verra ainsi de l’autre cĂ´tĂ© de l’OcĂ©an Atlantique s’épanouir une activitĂ© complĂ©mentaire de celle de Meudon.

Soleil et taches
Soleil et taches

Clichés pris par Jules Janssen à la fin du XIXème siècle à Meudon avec la lunette d’imagerie solaire.

A gauche : le soleil montre ses taches.

A droite : une observation du dĂ©tail des taches.

A Meudon, seules les deux guerres mondiales perturberont les observations. La qualitĂ©, la rĂ©gularitĂ© et l’homogĂ©nĂ©itĂ© des images produites Ă  l’Observatoire lui ont forgĂ© au fil des temps une rĂ©putation aujourd’hui internationale ; et nous sommes le seul Ă©tablissement Ă  disposer d’une collection continue de 9 cycles solaires. Il y a Ă©videmment peu de ressemblance entre le spectrohĂ©liographe de Deslandres et celui que nous utilisons aujourd’hui, en raison des progrès technologiques qui ont fait subir Ă  l’instrument des amĂ©liorations successives. NĂ©anmoins, le principe et les caractĂ©ristiques instrumentales ont toujours Ă©tĂ© conservĂ©s pour ne pas altĂ©rer l’harmonie de l’exceptionnelle collection.

Spectrohéliographe de Deslandres
Spectrohéliographe de Deslandres

Le spectrohéliographe de Deslandres au début du XXème siècle à Meudon.

Disque solaire
Disque solaire

Un siècle d’observations au spectrohéliographe séparent ces images de la chromosphère solaire, qui révèlent régions actives brillantes et filaments sombres dans la raie CaII K, les 9 Octobre 1900 et 9 Octobre 2000.

Janssen et Deslandres
Janssen et Deslandres

Les pionniers : Jules Janssen (1824-1907, Ă  gauche) et Henri Deslandres (1853-1948, Ă  droite)

Spectre solaire
Spectre solaire

Le spectre solaire constitue l’outil de diagnostic qui permet aux astronomes d’imager les différentes couches de l’atmosphère solaire. Dans le rouge (bas à droite), la raie Hα (656.3 nm) est universellement utilisée pour la chromosphère. Dans le bleu (en haut à gauche), la raie K de CaII 393.4 nm fournit une autre vision de la chromosphère. Il y a des milliers de raies disponibles, chacune caractéristique d’une transition entre 2 niveaux d’un atome particulier.