Exploration de Mars :

évolution des images télescopiques







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Même dans le cas de Mars, les observations télescopiques restent utiles parce qu'elles permettent un suivi régulier des planètes, en particulier du point de vue météorologique.

Les détecteurs numériques (CCD) ont complètement remplacé les plaques photo depuis le milieu des années 80 (sauf pour les images à très grands champs des télescopes de Schmidt). Cette évolution a permis une amélioration considérable de la qualité des images planétaires.



Voici un exemple d'image exceptionnelle sur plaque photographique, acquise depuis le Mont Wilson en 1956 (opposition périhélique). La calotte sud est en bas (l'image est redressée par rapport à la vision à l'oculaire), Syrtis Major est visible sur le bord gauche, très près du limbe.
Mount Wilson Observatory, 1956. Photo Robert Leighton.

Cette image a été acquise au cours de l'opposition rapprochée de 1988 au Lowell Observatory (Flagstaff), sur plaque photographique. Elle correspond au début du printemps de l'hémisphère sud. Le pôle sud de Mars et sa calotte sont tournés vers la Terre, comme durant toutes les oppositions périhéliques (le nord est en haut de l'image). On reconnaît la découpe de Valles Marineris, la tâche sombre allongée à l'équateur, dans la partie gauche de l'image. Les images couleurs sont acquises en trois passes, à travers des filtres rouge, vert et bleu ; les liserés de couleurs au centre de cette image et des suivantes sont dus à la rotation de la planète entre les trois prises. Sur les bords du disque, le halo bleuté est dû à la diffusion atmosphérique.
C'est une des meilleure, et une des dernières, photographies acquises depuis la Terre ; la qualité était limitée essentiellement par l'atmosphère terrestre, en perpétuelle agitation, et par les plaques photo. La résolution est de l'ordre de 200 km au centre du disque.




Lowell Observatory, 1988. Photo Leonard Martin.

Cette image-ci a été acquise depuis un autre grand instrument planétaire, le 1 mètre du Pic-du-Midi, la même année. C'est l'autre hémisphère qui est visible ici (la tâche sombre à gauche de l'image est Syrtis Major). On reconnaît de nouveau la calotte polaire sud, et le halo atmosphérique au bas de l'image.
Cette image surpasse de très loin tout ce qui avait été publié jusqu'alors. Elle a été acquise avec un CCD le 26 septembre 1988, alors que Mars était à 59,2 millions de km de la Terre. Cette opposition était la plus rapprochée depuis 1971, et la plus favorable aux observateurs de l'hémisphère nord depuis un siècle. Trois poses successives sont effectuées à travers des filtres bleu, vert et rouge, puis composités de façon à obtenir un blanc parfait sur la calotte (l'équilibre des couleurs est d'ailleurs un peu faussé, Mars n'est pas si rouge que ça vu dans un télescope). Les trois clichés numériques ont été traités pour faire ressortir les détails à haute fréquence (traitement par masque flou).




T1m Pic du Midi, 1988 (S2P). Observateurs : Lecacheux, Colas, Roques. Centrée sur Syrtis Major.

Une des premières images HST de 1993, acquise avant réparation de l'optique du télescope. La zone sombre au centre est Syrtis Major. Le défaut optique était compensé par traitement numérique (Richardson-Lucy). Cette méthode produisait des artefacts visibles, notamment des halos trop clairs autour des régions sombres (en particulier autour de Syrtis Major). La résolution est en principe bien meilleure que celle de n'importe quelle image prise du sol, car le télescope est au-dessus de l'atmosphère terrestre (voir image suivante) ; le défaut du miroir primaire dégradait cependant énormément l'image, qui n'est pas de meilleure qualité que la précédente.




HST/Nasa, 1993. Centrée sur Syrtis Major.

Image HST de janvier 1997, après réparation de l'optique. C'est le printemps de l'hémisphère nord, la calotte polaire nord tournée vers la Terre est en train de se sublimer. C'était une opposition aphélique, peu favorable à l'observation télescopique (la distance Terre-Mars est maximum) ; c'était pourtant à ce moment la meilleure image de Mars jamais acquise depuis la Terre : on distingue très nettement les petites variations à l'intéreur des régions sombres, les régions de matériau induré, à l'albédo intermédiaire (au nord-ouest de Syrtis), les voiles atmosphériques, et les détails de la calotte.




HST/Nasa, 1997. Centrée sur Syrtis Major.

Des images similaires peuvent toutefois être acquises depuis le sol. L'usage des CCD a considérablement amélioré la qualité des clichés télescopiques, surtout dans les bons sites planétaires. Le 1 mètre du Pic du Midi est particulièrement adapté à ce type d'observations qui exige un champ relativement grand : l'atmosphère est souvent calme, et se fige par instant pendant plusieurs dixièmes de secondes (le temps d'une pose sur Mars). Un des intérêts des CCD est la vitesse d'acquisition des images successives ; une sélection rigoureuse au moment de l'acquisition et plus tard pendant le traitement permet d'obtenir un grand nombre de très bonnes images. Dans les cas favorables, on voit que la qualité n'a rien à envier à HST (comparer les détails dans les régions sombres) ; l'avantage d'HST dans ce domaine est que toutes les images sont excellentes, sans exception.
Images acquises juste après le passage à l'opposition, milieu du printemps de l'hémisphère nord (opposition aphélique, défavorable). Elysium Planitia est au centre, Syrtis Major est au bord gauche du disque ; l'anneau sombre dans la calotte polaire est une zone désenglacée. L'image du Pic est améliorée par un simple masque flou et une optimisation de contraste.




A gauche : HST/Nasa, 1995.
A droite : T1m Pic du Midi, 1995 (S2P). Observateurs : Lecacheux, Colas, Erard.
Images centrées sur Elysium Planitia.
L'IRTF à Hawaï est un autre site de qualité exceptionnelle, équipé d'une caméra infrarouge (télescope Nasa). Les observations à ces longueurs d'onde sont difficiles depuis le sol à cause de la très forte absorption de la vapeur d'eau dans l'atmosphère terrestre ; elles ne sont possibles que dans des sites de haute altitude, particulièrement secs.
Commentaire de Jim Bell : « Ça pourrait bien être la meilleure image IR jamais acquise depuis le sol. La résolution estimée est de l'ordre de 40/50 km par pixel. Pendant quelques douces mais courtes heures cette nuit-là, c'était comme si le ciel s'était ouvert et qu'il n'y avait plus d'atmosphère au-dessus de nous. D'après cette image, il y a apparemment aucune activité atmosphérique sur Mars à ce moment ».
Valles Marineris est au limbe à gauche de l'image, la grande région sombre au nord est Acidalia Planitia. Remarquer les régions d'albédo intermédiaire au centre du disque sur l'image HST, et le passage aux régions claires vers la droite : ce type de contraste est extrêmement difficile à obtenir depuis le sol. Par contre, la bordure blanche autour des régions sombres est probablement un effet de traitement.




IRTF/Nasa (observateurs : Bell, Golisch, Moersch).
HST/Nasa, 1995.

L'usage des CCD, associé aux traitements numériques, a permis une amélioration fantastique des images télescopiques, discernable même sur des télescopes modestes. Comparer avec l'image de Lowell plus haut (le sud est en haut).
(Osservatorio di San Gersolè, 2 mai 1997. C'est un Cassegrain 60 cm ouvert à F/26 utilisé avec une caméra 800x800. Somme de 11 images acquises à 0,1 seconde en filtre I + restauration par Van-Cittert et optimisation du contraste ; on dirait qu'il y a un bel artefact de traitement sur la partie gauche de l'image...).




Pour en savoir plus :

Observations téléscopiques de Mars au Pic du Midi
Liens martiens
Quelques cartes de Mars en ligne
De la planète rouge à l'origine de la vie
Archives HST : toutes les images Hubble

Départ d'une source sur Terre
Osservatorio di San Gersolè, 1997

 
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Dernière mise à jour : 10 janvier 2006
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