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Les Exilés de la Terre au fil du texte...


Les personnages

  • Norbert Mauny * – astronome, directeur de la Selene-Company
  • Virgile * — serviteur de Mauny
  • Kersain – consul de France [personnage réel : Herbin (18XX–1884)]
  • Gertrude * — fille de Kersain
  • Fatima * — servante de Gertrude
  • docteur Briet * — oncle de Gertrude
  • Guyon – commandant du Lévrier
  • Mabrouki-Speke — ancien guide de Burton, Speke, Livingstone, Gordon – personnage réel
  • sir Bucephalus Coghill * — baronnet, contrôleur de la Selene-Company
  • Tyrell Smith * — serviteur de Coghill
  • lord Randolf Clederow — président de l'assemblée fondatrice de la Selene-Company
  • Peter Gryphins * – escroc, commissaire de la Selene-Company
  • Ignaz Vogel * – escroc, commissaire de la Selene-Company
  • Costérus Wagner * – escroc, scientifique, commissaire de la Selene-Company

  • Charles George Gordon — général, personnage réel (1833–1885)
  • le Mahdi Mehemet Achmet — personnage réel [Mohamed Ahmed (1844–1885)]
  • Kaddour * – le nain de Rhadamèh

    * : participe aux épisodes lunaires.


    Les lieux

  • Souakim [Souakin, Sawakin] (Reclus X, 391)
  • Rhadamèh, désert de Nubie — site fictif ?
    [Ghadamès ou Rhadamès : Oasis de Libye, dans le Fezzan occidental, à proximité du Sud tunisien et du Sahara algérien (Larousse). – rien à voir.]
  • Khartoum
  • Plateau et pic de Tehbali — site fictif ?
  • désert de Bayouda [Bayudha] (carte Reclus X, 438)
  • Berber [Barbar] (Reclus X, 389)
  • Puits d'Ouadi-Teraïb et d'Abou-Klea (bataille d'Abou Klea, 1885)
  • Ouady-Halfa

    – Élysée Reclus (1885) Nouvelle Géographie Universelle, livre X, L'Afrique septentrionale – bassin du Nil, Hachette, Paris.


    Science

  • P. 70–87. — L'intervention de Norbert Mauny à l'assemblée de la Selene Company.

    C'est un pendant rigoureux à l'intervention de Michel Ardan au meeting du Baltimore Gun Club dans De la Terre à la Lune (Chap. 19–20).

  • P. 81. — Citation du Père Secchi :

    « Le lien mystérieux qui relie tous les mondes est le magnétisme, force cosmique par excellence, puiqu'il n'est aucun corps qui échappe à son action. Cette force n'est pas une propriété spéciale à la Terre. Tous les mondes en sont pourvus ; ils agissent les uns sur les autres à la manière de vastes aimants d'une puissance énorme. » (p. 81) – Angelo Secchi (1818–1878), astronome italien. Cette citation pourrait être extraite (mais je ne l'y ai pas trouvée) de la traduction française de son ouvrage L'Unité des forces physiques (1869, Savy, Paris).

    « On ne peut douter qu'il n'en soit de même de la Lune, qui ne saurait faire une exception unique parmi les mondes. Kreil, Sabine, Bache, d'autres après eux, ont constaté que notre satellite influence les magnétomètres et que cette action varie avec son angle horaire. » (p. 81) Ceci est tiré de L'Unité des forces physiques du père Secchi : « [...] aujourd'hui le magnétisme occupe le premier plan parmi les forces planétaires. Des observations nombreuses prouvent que ce n'est pas une propriété spéciale à la Terre ; ainsi, certains aérolithes sont magnétiques. D'après les travaux de Kreil, Sabine, Bache et autres, la Lune influencerait ls magnétomètres et son action varierait avec l'angle horaire de notre satellite. » (L'Unité... p. 556.) Il est fait allusion à Kreil, Sabine et Bache à propos du magnétisme lunaire.

    Ci-dessus de gauche à droite :
    — Karl Kreil (1798–1862), météorologue et astronome autrichien (observatoires de Vienne et de Prague).
    — Edward Sabine (1788–1883), astronome britanique.
    — Alexander Dallas Bache (1806–1867), physicien et "surveyor" américain, arrière petit-fils de Benjamin Franklin (cf. son observation de l'éclipse de Soleil de 1860 dans nos notes sur Le Pays des fourrures).

    Ces scientifiques ont tous entrepris des mesures détaillées du champs magnétique terrestre et de son évolution temporelle. Ils ont mis en évidence une variation, faible mais significative, corrélée avec les phases de la Lune. On sait maintenant que la Lune n'est pas magnétique et qu'elle n'influe donc pas directement sur le champ magnétique terrestre. Ces variations sont en fait dues à des marées agissant sur l'ionosphère.

  • P. 81. — « Votre compatriote Gauss... »

    Laurie reprend ici encore un passage de L'Unité des forces physiques :

    « La terre, comme on le sait, est en réalité un vaste aimant d'une puissance énorme, que Gauss évalue [à] celle de 8464 trillons de barres d'acier pesant chacune une livre et aimantées à saturation (Gauss, General theory of terr. magn., No 31). » (L'Unité... p. 522.) La référence correcte à Gauss est son mémoire Intensitas vis magneticee terrestris ad mensuram absolutam revocata (Mesure absolue de l'intensité du magnétisme terrestre), publié en 1832.

  • P. 81. — La pyrite magnétique ou protosulfure de fer. « Cette pyrite... d'une combinaison de protosulfure et de bisulfure de fer. Elle était remarquablement stable, malléable et ductile à un degré éminent, au moins aussi magnétique que le nickel et le cobalt, sinon que le fer doux. » (p. 105) La pyrite ordinaire, de formule FeS2, ne devient magnétique qu'après chauffage.

    La pyrrhotine, ou pyrrhotite, ou pyrite magnétique, a pour formule Fe(1-x)S, avec 0 < x < 0,2. Le magnétisme augmente avec x. FeS est la troilite, non magnétique. Se trouve dans les sites volcaniques, mais pas de gisement signalé en Afrique ?

    — Cf. le projet de Thomas A. Edison (1847–1931) vers 1890 : Entourer une mine de fer (magnétite) du New-Jersey de plusieurs spires de fils électriques pour constituer un "cadre" géant servant d'antenne à un récepteur radio (comme les cadres qui équipaient les anciens postes de TSF), ce qui aurait constitué le premier radio télescope, destiné à étudier l'émission radio du Soleil. Ce projet n'a pas été finalisé (on sait maintenant qu'il aurait été voué à l'échec, car il aurait fonctionné à une fréquence trop basse qui ne passe pas à travers l'atmosphère terrestre). D'après une lettre d'Arthur E. Kennelly (1861–1939, du laboratoire d'Edison) à E.S. Holden (Lick Observatory) du 2 novembre 1890 (1958, Publ. Astron. Soc. Pacific, 70, 303). Voir également WT. Sullivan III (2009, Cosmic Noise, Cambridge University Press, pp. 19–20). (Voir notre étude parue dans Verniana.)

    Edison avait-il eu connaissance de l'édition anglaise du roman de Laurie juste parue (The Conquest of the Moon, a story of the Bayouda, 1889, S. Low, Marston, Searle & Rivington, London) ?

  • P. 104. — Comparaison avec l'observatoire du « pic du Midi , dans les Pyrénées, où s'est installé le général Nansouty ».

    L'observatoire du Pic du Midi s'est développé à partir des années 1870. À ses débuts, c'était surtout un observatoire météorologique. La première pierre du bâtiment a été posée en juillet 1878. La première coupole "en dur" date seulement de 1908. (E. Davoust, L'Observatoire du Pic du Midi, CNRS éditions, 2000.)

  • P. 113. — L'atmosphère de la Lune.

    Mauny a observé une « éclipse de Soleil en août dernier ».

    Mais il n'y eut pas d'éclipse de Soleil – ni partielle ni totale – en août 1884 (ni en août 1883). Pas d'éclipse non plus visible en Afrique en 1883–1884. Cependant, la zône de totalité de l'éclipse du 18 juillet 1860 (voir Le Pays des fourrures) a dû traverser le Soudan. Une éclipse totale historique a été observée à Khartoum le 25 février 1952.

    L'observation des éclipses de Soleil est l'une des méthodes qui permettent de déterminer ou non l'existence d'une atmosphère lunaire :

    « J'ai trouvé aux cornes du croissant solaire la forme arrondie et tronquée que Laussedat avait déjà signalé.../... Il m'a été donné de revoir le crépuscule lunaire observé par Schrœter. » (pp. 113–114) (Cf. De la Terre à la Lune qui cite Laussedat sur ce point. Schrœeter est cité dans Autour de la Lune, mais pas à propos du crépuscule).

    – Aimé Laussedat (1819–1907), militaire, astronome et géodésien français.
    – Johann Hieronymus Schröter (1745–1816), astronome allemand.

  • P. 118. — L'insolateur.



    Ci-dessus, les insolateurs utilisés comme source d'énergie par les Exilés de la Terre pour alimenter leur éles ctro-aimant (illustration de George Roux) et la maquette au 1/3 (ca 1880) du four solaire d'Augustin Mouchot (1825-1912) et Abel Pifre (1852-1928) au musée du CNAM (photo J.C.).

    Utilisation systématique de l'énergie solaire :

    « Sous le ciel du Soudan, nous obtenons et recueillons en moyenne 38 calories par minute et par mètre carré de surface d'insolation. » Une note précise qu'il s'agit de la « quantité de chaleur nécessaire pour élever d'un degré centigrade la température d'un litre d'eau », c'est-à-dire la grande calorie (actuellement kilocalorie).

    La constante solaire, quantité d'énergie reçue par mètre carré hors atmosphère, est maintenant bien connue :

    C = 1368 W m-2, soit 327 cal s-1 m-2 ou 19 kcal min-1 m-2.

    La valeur donnée par Laurie est donc bien exagérée.

  • P. 120. — Les travaux d'isolation. « Isoler le bloc magnétique dont se compose le pic de Tehbali. » Mais pourquoi faut-il isoler ce bloc ? Et pourquoi le faire avec du sable vitrifié alors que le sable lui-même est un bon isolant ? Le magnétisme, contrairement à l'électricité, ne nécessite pas d'isolation. Une isolation est nécessaire pour les fils électriques qui doivent entourer l'aimant, mais on remarque que Laurie est remarquablement muet sur leur conception.

  • P. 5 & 124. — Les astéroïdes.

    Conformément à un usage qui perdure de nos jours, les découvreurs d'astéroïdes ont le privilège de nommer leurs objets. Norbert Mauny a découvert deux petites planètes. L'une est dénommée Priscilla. Et l'autre...

    « – Elle n'est encore baptisée que d'un numéro, répondit en riant le jeune astronome. On découvre tant de planètes de nos jours, que c'est à ne plus savoir comment les nommer, ajouta-il modestement.
    — Appelez-la Gertrudia, dit le commandant Guyon, en regardant Mlle Kersain. » (p. 5)
    Ce qui sera fait : L'astéroïde « a pris désormais sa place au catalogue astronomique sous le nom de Gertrudia, que vous lui avez si gracieusement prêté. » (pp. 124–125) Deux astéroïdes porteront effectivement ces nom :

    – L'astéroïde (710) Gertrud : Nommé en 1912 par son découvreur l'astronome autrichien Johann Palisa (1848–1925) en l'honneur de sa petite-fille Gertrud Rheden.

    – L'astéroïde (2137) Priscilla : Découvert par l'astronome allemand Karl Reinmuth (1892–1979) en 1936, nommé en l'honneur de Priscilla Bok (1896–1975), épouse de l'astronome Bart J. Bok (1906–1983).

  • P. 214. — Le diamètre apparent de la Lune. « Il [le disque lunaire] occupait maintenant plus de la moitié du cercle ; pour parler plus exactement : son diamètre sous-tendait un arc de 182 degrés, 15 minutes et 22 secondes. » Un diamètre apparent supérieur à 180° (de surcroît avant le contact avec la Lune) est absurde.

  • P. 223. — La pesanteur sur la Lune.

    Correct.

  • P. 226. — La fuite de l'atmosphère.

    Pas de sas ! Comme pour l'expulsion du cadavre du chien dans Autour de la Lune, il s'agit de faire vite : « c'est à peine si quelques molécules s'échappèrent » (Autour de la Lune, Chap. 5) !

  • P. 235–236. — Le dé pipé. « Une fois lancé dans l'espace, il faut qu'il retombe sur le côté le plus lourd, c'est-à-dire sur sa base. » Faux. Je ne suis ni joueur ni tricheur et je n'ai pas l'expérience des dés pipés. Mais je sais que s'ils se stabilisent sur le côté le plus lourd, c'est seulement après avoir roulés sur la piste.

  • P. 256. — Encore l'atmosphère lunaire. « Nous avons ici 772 millimètres de hauteur mercurielle, et nous allons trouver dehors à peu près la même. C'est ce qui nous permet de conserver notre provision d'air avec une facilité relative et de circuler inpunément dans cette atmosphère si ténue de la Lune...
    — Si elle est si ténue, d'où vient que la pression barométrique soit identique à celle dont nous avons l'habitude ?
    — Il n'y a qu'une explication possible, c'est que l'atmosphère lunaire est beaucoup plus haute que celle de la Terre. »
    C'est en contradiction avec la loi des gaz parfaits : la pression doit être proportionnelle à la densité ! Jules Verne ne s'est guère plus soucié de ce problème à propos de l'atmosphère de la comète d'Hector Servadac.

  • P. 237. — Le cratère Rhéticus.

    Nommé d'après Georg Rheticus (514–575), astronome autrichien, l'un des premiers adeptes du système de Copernic. Ce cratère est près du centre de la face visible (0.0°N, 4.9° E, diamètre de 46 km).

  • P. 116 & 230. — Appareil Carré. « Vous y remarquerez des provisions importantes de chlorate de potasse et aussi ces grandes boîtes en zinc, portées par des bretelles qui leur donnent l'aspect d'autant de fontaines de marchand de coco : elles sont destinées à se remplir d'oxygène et à nous permettre de respirer dans tous les milieux possibles, sous l'eau comme dans le vide. » (p. 116)

    « Comment nous ferons pour respirer, quand nous n'aurons plus d'air ? répliqua Norbert en riant. Nous en fabriquerons, c'est bien simple !... N'avons nous pas nos produits chimiques, nos appareils Carré, tout l'outillage nécessaire ?... »

    « .../...des boîtes Carré ou "respirateurs à oxygène.../... »

    « .../...l'apparence d'une hotte de fer-blanc surmontée d'un gros sac de cuir. Ce sac se terminait sous le bras gauche par un appendice qu'il suffisait de presser avec le coude pour par un appendice qu'il suffisait de presser avec le coude pour déterminer le passage d'une certaine quantité d'oxygène dans un tube de caoutchouc. Ledit tube, enfin, aboutissait à la bouche et au nez du porteur, sur lesquels il s'appliquait hermétiquement à l'aide d'un demi-masque de cuivre garni de coussinets de chamois. » (p. 230)

    « .../...renouveler le gaz des appareils, à l'aide d'une petite lampe à alcool, alimentée par un reste d'oxygène, et d'un ballon de verre contenant le chlorate de potasse. » (p. 302)

    Il s'agirait d'un appareil respiratoire portatif destiné à régénérer l'oxygène de l'air à partir du chlorate de potasse.

    Le chlorate de potassium chauffé, en présence de dioxyde de manganèse comme catalyseur, produit de l'oxygène :

    2 KClO3 —› 2 KCl + 3 O2 Mais Laurie ne fait-il pas une confusion ? L'appareil Carré était une machine frigorifique. Il est cité par Jules Verne dans La Maison à vapeur (1879, Partie I, Chap. V) comme appareil à faire de la glace. Voir La Nature (1875, No 108, p. 49) et le Catalogue de la Société centrale de produits chimiques (ancienne Maison Rousseau, 44–42 rue des Écoles, Paris).

    [Ce n'est pas cet appareil à frapper les carafes qui est utilisé dans La Maison à vapeur, mais le congélateur à ammoniaque, bien plus performant, qui équipe une glacière. JV cite également Charles Tellier (1828–1913), ingénieur, qui a étudié la conservation par le froid.]

    – Ferdinand Carré (1824–1900), ingénieur. Il a également inventé une machine électrostatique.

    C'est l’appareil Reiset et Regnault qui est utilisé dans De la Terre à la Lune et Autour de la Lune. Une description détaillée en est donnée (De la Terre à la Lune, Chap. 23). Il s'agissait à l'origine d'un dispositif non portatif, expérimenté sur les animaux, destiné à étudier la respiration. En plus de la production d'oxygène à partir de chlorate de potassium, le dioxyde de carbone était éliminé par une solution de potasse (ce qui est indispensable en atmosphère confinée). Voir description et figure dans le Dictionnaire de Chimie de E. Bouant (1888, p. 840, Fig. 418) et la publication originale de V. Regnault et J. Reiset (Recherches chimiques sur la respiration des animaux des diverses classes, Bachelier, Paris, 1849).

    – Henri Victor Regnault (1810–1878), chimiste, physicien, académicien.
    – Jules Reiset (1818-1896), chimiste et agronome.

    C'est l'appareil de Galibert qui est utilisé dans Les cinq cents millions de la Begum.

    « Le contremaître prit dans une armoire deux réservoirs en zinc, pareils aux fontaines que les marchands de "coco" portent à Paris sur le dos. Ce sont des caisses à air comprimé, mises en communication avec les lèvres par deux tubes de caoutchouc dont l’embouchure de corne se place entre les dents. On les remplit à l’aide de soufflets spéciaux, construits de manière à se vider complètement. Le nez serré dans une pince de bois, on peut ainsi, muni d’une provision d’air, pénétrer impunément dans l’atmosphère la plus irrespirable. » (Les cinq cents millions de la Begum, Chap. 6)

    — A. Galibert.

    Badoureau et Grangier, dans Les Mines, les minières et les carrières (1892, p. 245), décrivent l'appareil de Regnard, portatif, mais qui utilisait de l'oxygène déjà préparé... également cité dans le Cours d'exploitation des mines (tome 6, pp. 1044-1045) de Haton de la Goupillière, avec une exposition historique et systématique des d'autres appareils du même genre.

    – Dr Paul Regnard (1850–1927).

    De même, le scaphandre Rouquayrol-Denayrouze, qui est utilisé dans Vingt mille Lieues sous les mers (1869), est autonome, mais utilise de l'air comprimé.

    Dans les Aventures extraordinaires d'un savant russe de George Le Faure & Henry de Graffigny (1889–1896) et dans Un Monde inconnu - Deux ans sur la Lune de Pierre de Sélènes (1896), c'est de l'oxygène liquéfié qu'emporteront les explorateurs-astronautes. (Procédé de MM. Cailletet et Raoul Pictet.)

    – Louis-Paul Cailletet (1832–1913) liquéfie en 1877 N2O, puis l'oxygène, l'hydrogène et l'air. Raoul Pictet (1846–1929) liquéfie l'oxygène la même année. Voir La Nature 1878(1) pp. 107–111.

  • P. 301 ff. — L'hémisphère invisible.

    Trois cents lieues à partir du cratère de Rhéticus. En fait, le limbe de la Lune est à 2580 km du cratère, soit 644 lieues de 4 km. Laurie a peut-être confondu le rayon et le diamètre ; il ne serait pas le premier à faire cette erreur !

    Le passage à l'autre hémisphère coïncide dans le roman avec le passage jour/nuit. Cela ne peut se produire qu'au moment de la pleine lune. Pouquoi cette coïncidence ? Pourquoi ne pas le signaler au lecteur ?

  • P. 306. — L'idée d'un observatoire lunaire.

    Des nuits de 14 jours ! Pas de pollution terrestre sur la face cachée (situation idéale pour la radioastronomie) ! Idée toujours actuelle ! Mais qui y a pensé le premier ?

  • P. 316. — Toujours l'atmosphère lunaire. « C'est bien d'azote, avec des traces d'oxygène, que se compose l'atmosphère lunaire. La densité de cet azote est seulement de 0.16200, c'est-à-dire égale au sixième de la densité du même gaz dans l'atmosphère terrestre. Ce fait est encore un corollaire logique de la faible intensité de la pesanteur sur le globe où nous nous trouvons. »

  • P. 328. — Autre allusion à De la Terre à la Lune. « Nous l'avons déjà fait, et nous le referons, sur une monture qui ne s'attarde pas en route et va deux fois plus vite qu'un boulet de canon... » (p. 328) Le voyage durait « 97 heures 20 minutes » dans De la Terre à la Lune. Soit 1,1 km/s. C'est bien deux fois la vitesse d'un boulet de canon pour l'artillerie de l'époque.

    Mais on lit « six jours, huit heures, vingt et une minutes et quarante-six secondes » ( à l'aller, p. 210, soit 152 h 21 min) et « cent cinquante-cinq heures et huit minutes » (au retour, p. 354) pour Les Exilés de la Terre.

  • P. 329. — La taille de l'astéroïde Gertrudia. « Ses dimensions, en effet, ne sont pas des plus considérables. Elle n'a qu'une superficie égale à la treize—centième partie de celle du globe terrestre. » Ce qui correspond à un diamètre de 350 km. Quatre astéroïdes de la Ceinture principale seulement dépassent cette taille (Ceres, Pallas, Vesta et Hygiea). La taille réelle de (710) Gertrud est d'environ 30 km.

  • P. 382. — Le pic de Tehbali — site fictif. « Le pic de Tehbali ?... Qu'est-ce que cette montagne-là ?... Je n'en ai jamais entendu parler !... Elle n'est pas sur la carte de l'état-major !... »

  • P. 389. — Le retour. « Voulez-vous que je vous donne un conseil ?... Gardez cela pour vous, et n'en parlez à personne qu'après avoir bien pris vos mesures pour être crus. Sans quoi vous passerez pour des charlatans ou de fous. » Cf. la fin d'Hector Servadac (Jules Verne, 1877) : « mettons que je n'ai fait qu'un rêve » (Partie II, Chap. 20).

  • — Le magnétisme des corps cosmiques.

    Sont magnétiques : la Terre, les planètes géantes (Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune).

    Sont faiblement magnétiques : Mercure, Vénus.

    Ne sont pas magnétiques : Mars, la Lune.

    Le magnétisme est lié à la présence d'un cœur métallique liquide où des mouvements de convection peuvent produire un effet dynamo. Ce qui n'est possible que pour des corps assez massifs.

    La Lune n'est donc pas magnétique, mais on ne le savait pas en 1888.

  • — Le magnétisme dans Le Sphinx des glaces (1897).

    Jules Verne s'est sans doute souvenu des Exilés de la Tere dans son roman Le Sphinx des glaces (1897). Il y imagine, près du pôle magnétique sud, un massif métallique magnétisé qui rappelle furieusement le pic de Tehbali. (Voir notre étude parue dans Verniana.)

    « Il y a là... là... un aimant... doué d'une force d'attraction prodigieuse !...
    Ce massif n'était qu'un aimant colossal.[.../...]
    Eh bien, ces courants continus aux pôles, qui affolent les boussoles, doivent posséder une extraordinaire influence, et il sufirait qu'une masse de fer fût soumise à leur action pour qu'elle se changeât en un aimant[.../...]
    Or, pour que le courant circulât autour de lui [le massif de fer] et en fit un aimant par induction, que fallait-il ?... Rien qu'un filon métallique, dont les innombrables spires, sinuant à travers les entraille de ce sol, fussent souterrainement reliées à la base dudit massif. » (Le Sphinx des glaces, Partie II, Chap. XV.)
    On note que ce massif est en fer (et non en pyrite magnétique), et soumis à des courants électriques qui sont ici naturels.

    © 2019 Jacques Crovisier

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