Extraits d'un article de Paul Chanson, paru le 1er Juin 1950 dans la revue "LE GENIE CIVIL", concernant le 3ème tronçon du téléphérique de l'Aiguille du Midi, qui ne dépassera jamais le stade de ligne de service.

L'année 1938 marque la reprise des travaux du téléphérique de l'Aiguille du Midi au dessus de la station des Glaciers, à 2400 m, sous l'impulsion de M. de Peufeuilhoux. Ce n'est plus l' Aiguille elle même qui sera l'aboutissement du funiculaire aérien, mais un "gendarme" situé près du Col du Midi à 3600 m d' altitude.

Ce point sera atteint en deux tronçons de même longueur (environ 1100 m). Le premier tronçon, Glacier-Arête, est construit en 1938. Pour cela, des rouleaux de câbles de 4 mm et des poulies sont portées par les guides Clérico et Farini, en charges de 30 kg, jusqu'à l'arête de granite qui a donné son nom à ce point intermédiaire (altitude 3100 m). Le problème du Col du Midi était plus difficile à résoudre, car il était indispensable de monter des pièces de 80 kg à l' altitude de 3600 m. M. de Peufeuilhoux, ancien pilote de chasse, choisit la solution audacieuse, qui devait réussir, de confier à M. Guiron, du Fayet, la mission de parachuter au Col du Midi, avec son petit avion équipé d'un moteur de 300 ch, le matériel destiné à l'ancrage du premier câble de service. Au cours de l'été 1939, 25 colis furent ainsi lancés sur la neige fraîche et retrouvés grâce à un long ruban rouge indicateur. Clérico, Farini, Wenger devaient, non sans péril, descendre jusqu'à l'Arête la cordine de 4 mm par une série de rappels de 50 m.

En Automne, la guerre est déclarée et il faut interrompre les travaux. Ceux ci sont repris le 15 Août 1940, et le 8 Septembre, la première ligne assurant le transport du personnel est inaugurée par M. Toubin, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées à Annecy.

Au cours de l'hiver 1940-41, la ligne est coupée et une équipe de guides doit fouiller la neige pour récupérer le câble et rétablir la ligne de service.

C'est alors que commence la construction du laboratoire des rayons cosmiques, début Septembre 1942. Malheureusement, trois semaines après, un grave accident, au cours duquel M. de Peufeuilhoux, alors ditecteur de la Compagnie Française des Funiculaires de Montagne (CFFM) trouve la mort, provoque l'interruption du chantier. Les câbles entre les Glaciers et le Col du Midi sont coupés. Ce transporteur aérien, établi par M. de Peufeuilhoux , était constitué par un simple câble de 12 mm de diamètre porteur-tracteur, de deux portées égales de 1100 m de longueur. L'appui intermédiaire entre les Glaciers et le Col était une simple poulie dont le support était directement scellé dans le rocher de l'Arête (3100 m). Deux bennes, l'une entre les Glaciers et l'Arête, et l'autre entre l'Arête et le Col, montaient et descendaient en même temps. Pour augmenter la charge utile du transporteur, le câble avait été purement et simplement doublé par un deuxième câble semblable, placé à 15 cm du premier. Mais des solutions aussi audacieuses ne devaient avoir qu'un temps.

Au printemps 1943, la ligne fut rétablie plus simplement. Un seul câble porteur-tracteur de 12 mm soutenait deux bennes équilibrées, l'une montante, l'autre descendante. De cette manière, la charge utile était de l'ordre de 300 kg au maximum. Durant l'été 1943, s'achevait l'érection du pylône intermédiaire de l'Arête à 3100 m, destiné au téléphérique de service définitif tel qu'on peut le voir actuellement. L'acheminement des bois et des charpentes jusqu'à l'emplacement du futur laboratoire des Cosmiques fut réalisé grâce à un petit transporteur aérien de 300 m de portée à peu près horizontale, au dessus du glacier, entre le gendarme d'arrivée du téléphérique et le laboratoire; cet aérien était servi par un simple treuil à main. En 1945, la CFFM installait sur le téléphérique, constitué jusqu'ici d'un simple porteur-tracteur de 12 mm, un câble porteur de 25 mm, permettant le transport de charges d'une tonne. Ceci facilita grandement le transport de charges lourdes vers la laboratoire (transformateur 15000 V, puis ultérieurement groupe éléctrogène diesel éléctrique).