Simulation Vlasov
 
Dans de nombreux plasmas spatiaux ou de laboratoire, l’échelle typique dissipative est de plusieurs ordres de grandeur inférieure aux échelles dynamique ou cinétique. C’est par exemple le cas des plasmas de laboratoire à haute température ou encore plus du vent solaire. Dans ce dernier cas en effet, le libre parcours moyen est de l’ordre de grandeur du système: une unité astronomique. Ce type de plasma peut donc être considéré sans collisions.
Toutefois, une description fluide de ces plasmas a souvent donné de très bons résultats pour décrire l’évolution à grande échelle (par rapport à l’échelle cinétique) du système. Par contre, les effets à des échelles de l’ordre de la longueur de Debye doivent être considérés avec une approche cinétique. Ces effets sont particulièrement importants car ils jouent un rôle similaire aux collisions dans les processus de redistribution d’énergie aux petites échelles.
 
Les  échelles cinétiques se manifestent notamment par l’apparition d’ondes cohérentes telles qu’ondes électrostatiques de Langmuir et ondes solitaires.
Les ondes solitaires sont associées à des trous de densité ainsi que des vortex dans l’espace des phases. Il a aussi dernièrement été suggéré que ces ondes pourraient jouer un rôle fondamental dans les processus de reconnexion magnétique. Ces structures sont observées dans de nombreux plasmas astrophysiques: frontière de la couche de plasma dans la queue de la magnétosphère, environnement de l’onde de choc de la Terre, ionosphère des zones aurorales, mais également vent solaire et dans environnement du satellite jovien Europa.
 
Au-delà d’un certain niveau, le développement d’onde de Langmuir devient turbulent. L’un des mécanismes les plus efficaces pour générer de telles ondes dans l’atmosphère solaire est l’instabilité faisceau-plasma. Elle est engendrée lors du passage d’un faisceau d'électrons généré ailleurs par un quelque mécanisme «énergétique». De tels faisceaux ont été observés dans le vent solaire  ainsi que les ondes de plasma associées. Ils seraient émis lors de reconnexion magnétique dans la couronne solaire. Toutefois, ces mêmes observations laissent à penser que les électrons les moins énergétiques (de l’ordre de quelques keV) perdent de l’énergie en traversant le milieu interplanétaire. Là encore, les ondes solitaires pourraient jouer un rôle en association avec des inhomogénéités de densité.
Les mesures radio à basse fréquence (quelques kHz à quelques MHz) donnent un autre exemple du rôle fondamental des processus à petites échelles sur des structures à plus grandes échelles. Ce domaine de fréquence est caractérisé par des émissions radios sporadiques liés à l’activité solaire (émission de type II ou III).  Ginzburg et Zheleznyakov (1958) ont fait l‘hypothèse que ces ondes résultaient de la conversion, par des mécanismes non linéaires, d’onde de Langmuir, engendrées par des faisceaux d’électrons, en ondes électromagnétiques. Sturrock (1964) montra cependant que la croissance des ondes devrait retiré toute l’énergie du faisceau qui ne pourrait parcourir que quelques kilomètres dans le milieu, ce que contredisent les observations. Depuis lors, les interactions ondes-particules ont été étudiées pour trouver un mécanisme qui permette de limiter la croissance des ondes. Mais de nouveau, les observations montrent des désaccords entre les émissions radio et les mesures in situ d’ondes et particules.
Il reste donc beaucoup à comprendre.
 
L’analyse théorique de la génération et de l’évolution des structures cohérentes ainsi que des processus cinétiques est l’un des sujets majeurs de la physique des plasmas contenporaine. Cette analyse est basée sur l’équation de Vlasov, couplée de façon auto-consistente à l’équation de Poisson. Le système Vlasov-Poisson est un système complexe non linéaire d’équations qui ne peut pas être résolu analytiquement, même dans les cas les plus simples. En conséquence, les études des plasmas sans collisions, des échelles cinétiques et de leur dynamique sont basées sur des simulations numériques.
Ces études théoriques sont complétées par des analyses de données obtenues par l’instrument WAVES à bord des satellites de la mission STEREO.
 
Dans notre étude, nous avons cherché à comprendre le comportement d’un plasma non collisionnel soumis à des perturbations temporelles et localisées de la fonction de distribution électronique. Contrairement à la plupart des études présentent dans la littérature, nous n’essayons pas de déclencher l’instabilité faisceau plasma. La perturbation que nous apportons au plasma est équivalente à un léger chauffage des électrons et nous cherchons à caractériser l’évolution du plasma résultant.
 
Nous avons ainsi montré que des structures électrostatiques de type ondes solitaires se développaient très vite. Ces ondes sont toujours associées à des trous de densité électronique et des vortex dans l’espace des phases. Elles résultent du piégeage des électrons les plus lents. Les particules non piégées se déplacent quant à elles librement dans le milieu, créant localement une bosse dans la fonction de distribution électronique et déclenchant des instabilités requises pour engendrer des ondes de Langmuir. Autrement dit, nous avons mis en évidence un autre mécanisme pour générer ces ondes, mécanisme moins contraignant que la présence de faisceaux d’électrons.
Une étude complète sur le comportement du plasma sous différentes conditions d’excitation (amplitude, durée, fréquence, rapport de masse  et de température des espèces) est en cours.
 
Ce mécanisme pourrait être aussi à l’origine des structures fines dérivantes observées dans le domaine décamétrique.
Nous étudions plusieurs aspects du problème de la modélisation Vlasov d’un plasma sans collisions. Le but principal est l’étude de la dynamique à petite échelle, l’identification des processus à l’origine de la formation de structures cohérentes et la comparaison des propriétés de ces structures avec celles qui sont observées dans le vent solaire. Une première ligne de recherche est donc l’étude de la formation dynamique de structures cohérentes dans des conditions typiques du vent solaire dans la limite électrostatique et la dépendance de ces structures par rapport aux paramètres physiques plus importants.