Observatoire de Paris Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

Élection de Guy Perrin à l’Académie des sciences

mardi 20 décembre 2022

Double distinction pour Guy Perrin en 2022. Après le prix Fizeau Lifetime Achievement 2020 remis le 20 juillet 2022 à Montréal, il vient d’être élu à l’Académie des sciences. Cette distinction vient couronner une brillante carrière en interférométrie optique et son implication dans l’instrument GRAVITY. Aux côtés de Frank Eisenhauer, également élu à l’Académie des sciences en 2022 comme membre associé étranger, Guy Perrin est responsable de la contribution française à GRAVITY sur le VLTI. Reconnu comme le plus puissant des interféromètres optiques, il permet l’étude de Sgr A*, le trou noir supermassif au centre de la Voie Lactée.

Guy Perrin
Guy Perrin

© Julie Sansoulet, CNRS

Des débuts bien éloignés de l’astronomie

Originaire de Saint-Étienne, c’est dans cette ville que Guy Perrin a fait ses études : série scientifique, classes préparatoires en 1986 puis il intègre l’École polytechnique en 1989. À ce stade de son parcours, aucune affinité particulière avec l’astronomie et l’astrophysique mais le projet de devenir ingénieur pour diriger une entreprise. Une formation axée sur les sciences, les mathématiques et la physique essentiellement. Il y cherchait à la fois ouverture d’esprit et pluridisciplinarité. De belles années confie-t-il. Il ne se destinait ni à la recherche, ni à l’enseignement. L’avenir allait prouver le contraire.

Des rencontres qui éveillent puis renforcent sa vocation

En première année, à l’École d’application du train à Tours, Guy Perrin découvre l’astronomie à travers un ouvrage d’Hubert Reeves sur lequel il échange avec son camarade de promotion Alain Lecavelier. Une première révélation. Au cours de ses deux années d’école à Polytechnique il suit un cours dispensé par Michel Spiro, futur directeur de l’IN2P3 et président du conseil du CERN, et Robert Mochkovitch, astrophysicien à l’IAP. C’est alors que sa vocation s’affirme et qu’il commence à songer à faire une thèse en astronomie en vue d’une carrière dans l’industrie spatiale.

En 1992, à l’occasion du stage d’option qui occupe les deux derniers mois de l’École polytechnique, il passe deux mois à l’IAP (Institut d’astrophysique de Paris) dans l’équipe d’Alfred Vidal-Madjar et étudie Beta Pictoris en binôme avec Alain Lecavelier qui lui avait proposé de faire le stage avec lui. C’est une seconde révélation et il décide de faire une thèse en astronomie. En DEA, il croise la route de Pierre Léna dont il suit le cours d’instrumentation à haute résolution angulaire. Il découvre alors une maquette du VLT et le projet d’interféromètre du VLT, le VLTI. Passionné par ce projet, ses choix en faveur de l’astronomie se confirment. Il se lance dans une thèse très instrumentale, en interférométrie à fibre, qu’il soutient en 1996 et au cours de laquelle il collabore avec Vincent Coudé du Foresto, également en thèse avec Jean-Marie Mariotti.

Une carrière vouée à l’interférométrie optique

Alors qu’il est doctorant dans le groupe de haute résolution angulaire de Pierre Léna, Guy Perrin travaille au sein d’une équipe engagée dans la démonstration des performances des fibres monomodes pour les mesures interférométriques. Cette équipe est composée de Vincent Coudé du Foresto, Jean-Marie Mariotti et Steve Ridgway. Ils réussissent alors à transformer l’expérience FLUOR (Fiber Linked Unit for Optical Recombination) pour en faire le premier instrument de précision dans ce domaine. On retient notamment ses travaux, très cités, sur l’échelle de température effective des étoiles géantes ou sur les caractéristiques des étoiles géantes et super-géantes rouges.

En parallèle de ces travaux expérimentaux, Guy Perrin a conduit des travaux théoriques sur la méthode d’interférométrie monomode, depuis l’étalonnage, les effets du bruit de photon, jusqu’au champ de vue. Il s’est engagé dans des concepts innovants avec l’expérience ‘OHANA (Optical Hawaiian Array for Nanoradian Astronomy) dont Jean-Marie Mariotti avait eu l’idée, pour la recombinaison d’interféromètres kilométriques par fibres ou l’expérience FIRST (Fibered Imager foR Single Telescope) pour l’imagerie à haute dynamique qu’il propose pour de grands télescopes optiques.

L’application de l’interférométrie optique à l’astrophysique extragalactique

Très tôt, Guy Perrin fait avancer de pair ses objectifs scientifiques en astrophysique stellaire et les possibilités instrumentales. Mais rapidement ses intérêts se tournent également vers le potentiel de l’interférométrie optique pour l’astrophysique extragalactique et notamment les noyaux actifs de galaxies. On le retrouve alors comme porteur de la contribution française à l’instrument VLTI/MIDI (Mid Infrared Interferometer) dont il a été Co-PI.

MIDI a permis de comprendre la nature de l’environnement de poussière des noyaux actifs de galaxies (AGN) au centre desquels se trouvent des trous noirs supermassifs. Sa motivation pour le projet ‘OHANA était l’accès à une grande sensibilité et à une grande résolution angulaire, en particulier pour l’étude de l’environnement immédiat des trous noirs supermassifs dans l’infrarouge proche. Il a constitué un pas essentiel vers un instrument ayant ces capacités, en débloquant des verrous sur les fibres infrarouges et leur utilisation pour l’interférométrie de haute précision et de haute sensibilité. Il a ainsi joué un rôle très important pour l’instrument VLTI/GRAVITY (PI Frank Eisenhauer) dont Guy Perrin est l’un des principaux architectes.

Enseignement et encadrement de la recherche

Tout au long de sa carrière, Guy Perrin s’est largement investi dans l’encadrement et l’enseignement. Il a ainsi dirigé les travaux de nombreux jeunes chercheurs dont certains poursuivent aujourd’hui de belles carrières en astronomie. Il enseigne aux étudiants des masters recherche et OSAE de l’Observatoire de Paris et de ses partenaires académiques et à l’Institut d’Optique Graduate School. Il s’est également engagé dans d’importantes responsabilités d’administration de la recherche au service de la communauté. Dans un premier temps, il a occupé, pendant 6 ans, le poste de vice-président du conseil scientifique de l’Observatoire de Paris de 2011 à 2016. Dans le cadre de ces fonctions, il a monté le DIM ACAV (Domaine d’intérêt majeur Astrophysique et Conditions d’Apparition de la Vie) de la région Île-de-France puis la proposition de DIM ACAV+.

Il a été DAS (Directeur adjoint scientifique) du CNRS/INSU chargé du domaine astronomie-astrophysique pendant 5 ans, de 2017 à 2021. Il a rejoint, au 1er janvier 2022, le MESR (Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche) comme chargé de mission astronomie et recherches spatiales. Avec l’élection de Guy Perrin à l’Académie des sciences, le LESIA est de nouveau distingué pour la qualité de ses recherches et compte à présent une académicienne et trois académiciens dans ses rangs.