Observatoire de Paris Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

James Webb : premières images d’une exoplanète dans l’infrarouge moyen

mardi 6 septembre 2022

Neuf mois après son lancement, le télescope spatial James Webb fournit des images inédites d’une exoplanète, les premières jamais obtenues dans l’infrarouge moyen. Une équipe d’astronomes français, impliquée dans les observations de cette planète et dans la conception des coronographes du télescope, nous explique comment ce type d’images va révolutionner notre connaissance des mondes extrasolaires.

Lancé le 25 décembre 2021, le James Webb a terminé sa phase de tests en juillet 2022. Les programmes scientifiques ont depuis débuté et produisent déjà leurs premiers résultats, dont la première image d’une exoplanète obtenue dans l’infrarouge moyen : HIP 65426 b. Il s’agit d’une exoplanète géante très jeune, d’environ 15 millions d’années, située à 90 unités astronomiques de son étoile. D’une masse estimée à environ 7 masses de Jupiter, elle avait été découverte avec l’instrument SPHERE au Very Large Telescope en 2017. Les instruments du James Webb rendent désormais possible son observation directe.

Images de l'exoplanète HIP 65426 b observées par NIRCAM (3.3 et 4.4 microns) (...)
Images de l’exoplanète HIP 65426 b observées par NIRCAM (3.3 et 4.4 microns) et MIRI (11.4 et 15.5 microns)

L’étoile blanche indique la position de l’étoile hôte.
Crédit NASA/STScI/ESA publié par Carter et al. 2022.

C’est grâce aux instruments NIRCAM et MIRI que l’exoplanète HIP 65426 vient d’être observée, dans le cadre d’un programme « Early Release Science » mené par une collaboration internationale incluant plusieurs chercheurs français des laboratoires de l’IPAG, du LAM, du LESIA, du CEA, et du Laboratoire Lagrange. MIRI est le seul instrument en infrarouge moyen du James Webb. Son système imageur a été conçu en partie par un consortium de laboratoires français mené par le CEA/AIM. Il embarque un système coronographique grâce auquel on peut atténuer la lumière provenant de l’étoile centrale, ce qui permet d’obtenir des images des exoplanètes et d’étudier leur atmosphère. Les coronographes de MIRI, reposent sur une innovation technologique inventée à l’Observatoire de Paris-PSL. Selon Anthony Boccaletti, “les performances sont meilleures que celles initialement prévues”.

Images coronographiques simulées (en haut) et mesurées (en bas) avec les 4 (...)
Images coronographiques simulées (en haut) et mesurées (en bas) avec les 4 coronographes de MIRI

Les 4 coronographes de MIRI fonctionnent aux longueurs d’onde 10.65, 11.40, 15.50 et 23.00 microns (Boccaletti et al. 2022).

La publication récente de ces résultats montre que la lumière stellaire peut être atténuée d’un facteur 10 000 à 100 000. “Ces coronographes fonctionnent aux longueurs d’ondes de 10.65, 11.40 et 15.50 microns, choisies spécialement pour sonder l’atmosphère des exoplanètes géantes, identifier des molécules comme l’ammoniac, et complémenter les observations obtenues au sol en infrarouge proche", précise Pierre Baudoz.

Les données recueillies sur HIP 65426 b fournissent la première mesure fiable de la température qui règne dans l’atmosphère de cette exoplanète : 1400°C. “Cela correspond à la température de la flamme d’un briquet. On s’attend ainsi à ce que des petits grains de poussière formés de silicates se forment et restent en suspension dans l’atmosphère de l’objet”, note Mickaël Bonnefoy, chercheur à l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG). “JWST démontre son potentiel pour étudier en détail les propriétés physico-chimiques de ces mondes extrasolaires et mieux comprendre leur formation. Les images pourraient aussi révéler de nouvelles planètes encore inconnues dans ces systèmes”, renchérit Gaël Chauvin de l’Observatoire Lagrange (Nice).

Ces images spectaculaires sont les premières d’un programme entier dédié aux observations directes de systèmes exoplanètaires proches. "Nous travaillons maintenant sur les images d’un système encore plus jeune de 5 millions d’années, autour duquel il reste encore énormément de gaz et de poussière” indique Élodie Choquet, chercheuse au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM). Avec ces analyses, nous saurons si ces poussières contiennent de la glace d’eau comme les comètes dans notre système solaire.

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