Observatoire de Paris Institut national de recherche scientifique français Univerité Pierre et Marie Curie Université Paris Diderot - Paris 7

L’affaiblissement de l’étoile Bételgeuse en image

vendredi 14 février 2020

Une équipe internationale d’astronomes comprenant des chercheurs de l’Observatoire de Paris-PSL a obtenu en décembre 2019 une image de la surface de la célèbre étoile supergéante rouge Bételgeuse, afin de comprendre les raisons de sa faible luminosité actuelle.

Vue de Bételgeuse par l'instrument SPHERE en décembre 2019
Vue de Bételgeuse par l’instrument SPHERE en décembre 2019

Crédits : ESO/M. Montargès et al.

Bételgeuse est un phare dans le ciel nocturne pour les observateurs, mais elle a commencé à faiblir de manière anormale à partir de novembre 2019. En ce mois de février 2020, Bételgeuse est à environ 36% de sa luminosité habituelle, un changement aisément perceptible à l’œil nu. Cette luminosité est la plus faible observée depuis au moins 150 ans.

La nouvelle image de la surface visible de la supergéante, d’une finesse exceptionnelle, a été obtenue grâce à l’instrument SPHERE équipé d’une optique adaptative, et installé sur un des quatre télescopes de 8,2m du VLT (Observatoire de Paranal, Chili). Elle montre un changement spectaculaire de son apparence.

A l’aide de différents télescopes et instruments d’observation, l’équipe dirigée par Miguel Montargès, astronome à l’université KU Leuven (Belgique), cherche à comprendre pourquoi Bételgeuse est entrée dans une phase de très faible luminosité depuis le mois de novembre 2019.

Bételgeuse avant et après l'affaiblissement
Bételgeuse avant et après l’affaiblissement

Comparaison de l’étoile Bételgeuse avant et après son affaiblissement sans précédent. Les observations, prises avec l’instrument SPHERE sur le VLT en janvier et décembre 2019, montrent combien l’étoile s’est estompée et comment sa forme apparente a changé.
Crédits : ESO/M. Montargès et al.

L’équipe avait observé Bételgeuse avec SPHERE en janvier 2019, avant qu’elle ne commence à faiblir, nous donnant ainsi une comparaison de son aspect avant et après son affaiblissement. Ces images en lumière visible mettent en évidence les changements qui se produisent à la surface. Le disque de l’étoile apparaît beaucoup plus irrégulier et asymétrique que dans son état habituel. Si la taille globale de l’étoile reste comparable, la partie Sud de l’étoile (en bas de l’image) est devenue beaucoup plus sombre que la partie Nord.

De nombreux amateurs d’astronomie se sont demandé si l’affaiblissement de Bételgeuse indique qu’elle est sur le point d’exploser en supernova. Même si cette possibilité existe en effet, les chercheurs pensent que la probabilité d’une explosion prochaine est très faible. « Les deux scénarios sur lesquels nous travaillons pour expliquer nos observations sont un refroidissement de la surface dû à une activité stellaire exceptionnelle ou une éjection de poussières masquant l’étoile », explique Miguel Montargès.

Les panaches de poussière de Bételgeuse vus par l'instrument VISIR/NEAR
Les panaches de poussière de Bételgeuse vus par l’instrument VISIR/NEAR

Crédits : ESO/P. Kervella/M. Montargès et al. - Remerciement : Eric Pantin.

Une autre image, prise avec l’instrument VISIR/NEAR du VLT en décembre 2019, montre la lumière infrarouge émise par la poussière entourant Bételgeuse. Ces observations ont été réalisées par une équipe dirigée par Pierre Kervella, astronome au LESIA / Observatoire de Paris-PSL.

"La présence de cette grande quantité de poussière autour de Bételgeuse renforce notre hypothèse selon laquelle la formation de poussière est une cause de son affaiblissement actuel". La longueur d’onde de l’image VISIR/NEAR est comparable à celle des caméras thermiques. Les nuages de poussières, qui ressemblent à des flammes dans l’image VISIR/NEAR, se forment lorsque une éruption de l’étoile projette sa matière dans l’espace.

"L’épisode actuel de faiblesse de Bételgeuse est une opportunité exceptionnelle de mieux comprendre les supergéantes rouges comme Bételgeuse. De nombreux astrophysiciens et les plus grands instruments d’observation sont mobilisés pour suivre le phénomène." conclut Pierre Kervella.

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