mardi 6 janvier 2009, par Jean-Marie Malherbe & Sylvain Cnudde
Dès le XVIIème siècle, on a commencé à étudier, sans le savoir, les champs magnétiques du Soleil par la simple observation des taches. En 1611, Fabricius met en évidence des taches sombres à la surface du Soleil. Galilée, en 1613, parvient à observer les taches solaires grâce à la lunette qu’il vient d’inventer quelques années plus tôt. L’observation des taches n’a pas cessé depuis.
Passage d’un groupe de taches sur le disque solaire du 11 au 23 mai 1625. © Observatoire de Paris
Observées à la fin du XIXème siècle par Jules Janssen, fondateur de l’observatoire de Meudon, dans la raie G de Fraunhofer à 4305 Å, à l’aide des premières plaques photographiques au collodion iodo-bromuré. © Observatoire de Paris
Mais pour mesurer les champs magnétiques, il faudra attendre bien d’autres découvertes ! En 1672, Isaac Newton décompose la lumière solaire au travers d’un prisme et admire pour la première fois le spectre solaire. Les raies spectrales d’absorption, très fines, ne seront mises en évidence que beaucoup plus tard, par Joseph von Fraunhofer en 1817. Ces raies caractérisent les éléments chimiques présents dans l’atmosphère du Soleil (Hydrogène, Hélium, éléments métalliques en traces). Ce n’est qu’en 1891 qu’Henri Deslandres met au point, indépendamment de George Hale aux USA, le spectrohéliographe, spectrographe qui permet par décomposition de la lumière d’étudier dans les détails les profils des raies spectrales. C’est ensuite Pieter Zeeman, physicien hollandais, qui découvre en 1896 que les raies des atomes plongés dans un champ magnétique se scindent en plusieurs composantes polarisées dont l’écartement est proportionnel au champ magnétique. Enfin, George Hale comprend en 1908 que des champs magnétiques intenses sont associés aux taches solaires. Puis la polarimétrie, technique permettant d’analyser la polarisation de la lumière, donc d’exploiter l’effet Zeeman, prend son essor en France avec Bernard Lyot dans les années 1940.
Les découvertes scientifiques successives (spectres des atomes, effet Zeeman) conjuguées aux progrès technologiques (spectrographes, polarimètres) seront perfectionnées au cours de la seconde moitié du XXème siècle, dont l’aboutissement est la mise en service du télescope THEMIS aux Canaries (Tenerife) en l’an 2000.
Cliché pris à Meudon par Raymond Michard à l’aide de la grille de Hale dans les années 1950/1960. Ce sont des spectres alternés en polarisation circulaire droite ou gauche. © Observatoire de Paris
L’observation assidue des taches solaires, qui constituent le meilleur indicateur des champs magnétiques solaires, a permis, grâce à leur observation systématique depuis près de 4 siècles, de mettre en évidence le cycle d’activité du Soleil et ses fluctuations.
Nombre de taches solaires (dit de Wolf) en fonction du temps. ©Global Warming Art / Wikipedia
En examinant le nombre de taches, ou groupes de taches, au fil des années, les astronomes ont trouvé un cycle de durée moyenne de 11 ans, qui présente une alternance de périodes sans taches (le minimum solaire) et de périodes actives riches en taches (le maximum solaire). La mesure des champs magnétiques a permis d’établir au XXème siècle que le cycle magnétique dure en réalité 22 ans avec un renversement de la polarité des deux hémisphères solaires tous les 11 ans. La figure ci dessus montre que la cyclicité de 11 ans est bien régulière dans le temps. Mais il existe des périodes de cycles forts consécutifs (autour de 1770, 1850, 1950) qui alternent avec des périodes de cycles faibles, comme les minima de Maunder au siècle de Louis XIV, ou de Dalton sous Napoléon Bonaparte. Nous n’en connaissons pas encore les mécanismes.